Du côté de la librairie... Septembre 2021

Lors d’une soirée très arrosée, deux membres de l’équipe sportive du lycée raccompagnent une jeune fille chez elle, et … la rumeur est lancée. Entre accusation, déni, honte, colère, les amitiés sont mises à mal. C’est un puzzle à reconstituer. Les personnages nous offrent tour à tour leur point de vue et chemin de vie, eux qui tous ont construit leur identité sur une rumeur. Et une grande question nous taraude, peut-on oublier ce qu’on n’a jamais vraiment su ? Un premier roman qui impose une nouvelle voix dans la littérature anglo-saxonne. Kate Reed Petty mixe les styles d’écritures, sans jamais nous perdre, et toujours au service de l’histoire. Une réussite.

Une journaliste australienne décide de faire un reportage sur le Rojava, ancien pays Kurde et nous amène avec elle dans les traces du destin de Tékochine et Gulistan, deux combattantes kurdes mortes pour leur cause, et enterrées ensemble. Comme un devoir de mémoire, Patrice Franceschi met en lumière ces femmes incroyablement fortes et courageuses, dans leur quête d’un territoire libre, démocratique, laïque et égalitaire dans ce coin reculé et rude du Moyen Orient. Un hommage bouleversant à ces femmes aux longues tresses noires, qui placent la liberté au-dessus de tout. Magnifique.

Dans une famille où l’on est marins de père en fils, l’un des enfants voit son destin basculer après avoir contracté le virus de la polio. Il ne sera pas marin, mais parcourra néanmoins le globe en devenant ingénieur. Marc Dugain retrace ici la vie de son père mais aussi l’histoire du XX^e siècle. Un hommage intime à l’homme mais aussi à l’époque.

Une jeune femme allemande exilée à Londres, mal à l’aise avec ce vagin qui lui a été attribué à la naissance et rêvant de s’offrir un pénis, a rendez-vous avec son chirurgien esthétique le Dr. Seligman. Dans le huis-clos du cabinet, jambes écartées, elle livre un long monologue délirant, mêlant ses interrogations, ses sentiments, ses obsessions, son histoire familiale et ses fantasmes. C’est parfois dérangeant, souvent déstabilisant, mais toujours hilarant et subversif. C’est un texte féministe qui explore la question du genre avec brio et interroge l’histoire et la culpabilité allemande (« vous faites quelque chose que jamais je n’aurai pu penser dans ma langue maternelle. Vous donnez à une Allemande une bite juive, une Jewish cock. »).

Avec son dernier ouvrage, Victor del Arbol quitte le roman policier pour nous plonger au cœur de la guerre religieuse et ethnique qui a meurtri l’Ouganda dans la dernière décennie du XX^e siècle. Isaie, réparateur de vélos à Barcelone, bientôt papa a tout fait pour enfouir son passé et mener une existence tranquille. Jusqu’à ce qu’un ancien camarade, maintenant fonctionnaire du gouvernement ougandais, l’invite à participer à un sommet de réconciliation nationale en témoignant en tant qu’« enfant-soldat ». En acceptant et en emmenant la femme qu’il aime, il va devoir faire face à ses démons et à pactiser avec le mal… Haletant.

En 1950, lorsque que Kate Charlesworth, l’autrice, voit le jour à Barnsley l’homosexualité masculine constitue encore un délit au Royaume-Uni. La petite Kate se rend compte assez vite que le modèle que lui propose sa famille ne lui convient pas. En quête d’autres modèles, son entrée aux beaux-arts marquera un tournant pour elle. À travers l’histoire de son émancipation de l’hétéronormativité et du poids de la culpabilité familiale, l’autrice nous livre la petite histoire dans la grande histoire. Dans un subtil mélange des genres, mêlant à la fois le reportage graphique et l’autobiographie, Kate Charlesworth nous fait découvrir la longue lutte des personnes LGBTQI+ pour l’égalité au Royaume-Uni.

À l’école, Kate a écopé du surnom « Kate Moche ». Une bande de vilains se moque d’elle. Mais Kate s’en moque car quand elle se regarde dans le miroir c’est une scientifique expérimentée qu’elle voit ou une cascadeuse vaillante ou même une exploratrice courageuse. Un album pour parler de la différence et de l’acceptation de soi.