Du côté de la librairie... Septembre 2024

Avec ce nouveau roman, Muriel Barbery change de registre et passe du récit de voyage initiatique à un huis-clos pour le moins énigmatique. Réunis dans l’Aubrac par le décès prématuré de Thomas Helder, auteur et poète de renom, Margaux et ses vieux amis depuis longtemps séparés se retrouvent dans une maison chargée de souvenirs. Thomas, qui a quitté son Amsterdam chérie pour venir passer ses derniers jours dans cet endroit plus qu’isolé, a laissé à cette dernière une lettre qui ne lui laisse pas le choix que de se confronter aux fantômes d’un passé qu’elle aurait préféré continuer à fuir. Un roman d’atmosphère d’une grande sensibilité, qui offre à ses lecteurs et lectrices le temps de nombreuses réflexions, sur le deuil et le temps qui passe, mais aussi sur l’amitié qui dure, le rôle de l’auteur et du poète dans la société, et tant d’autres encore. Brillant.

Rencontre le 25 septembre à 19h avec l’autrice.

À 50 ans passés, Armand et Birke n’ont rien perdu de leur superbe et forment le couple iconique de la scène théâtrale française. Séduisants, charismatiques et talentueux, ils peinent à comprendre comment leur fille Miranda, 27 ans, se montre aussi terne et insignifiante. Elle qui a pourtant grandi entourée de modèles de bonheur et de réussite intenses voire carrément outranciers semble dépourvue de la moindre capacité à exister. Mais connait-on vraiment les gens qu’on aime ?

Avec un talent de conteuse hors pair et un ton franchement irrévérencieux, Rebecca Lighieri (également connue sous le nom d’Emmanuelle Bayamack-Tam) nous offre une aventure littéraire aussi sensible que jubilatoire. 

Automne 2022. Chiraz. Zahra, jeune adolescente iranienne de 16 ans surnommée par sa mère badjens (mauvais genre, effrontée) escalade une benne à ordure, prête à incendier son foulard. Face à la foule, elle se remémore par flash-backs sa naissance non désirée parce que fille, son enfance auprès d’un père castrateur et d’une mère complice de son émancipation, le bout de tissu qu’on lui impose dont elle aimerait juste s’affranchir ainsi que son corps assoiffé de désir et ses premiers amours… Ce monologue intime est un véritable cri, celui de toutes ces femmes iraniennes qui se battent et veulent se libérer du joug de la religion et du poids du patriarcat.  Un texte court au style vif, une véritable ode à la liberté. 

Où se situe le « pays de nulle part », « cet endroit secret où les enfants perdus ne grandiront jamais » ? Voilà la question à laquelle Doan Bui tente de répondre dans ce texte aussi intime qu’universel, entamé il y a plus de dix ans. L’autrice y déploie une autodérision parfois déroutante et s’aide de la troisième personne du singulier pour raconter l’indicible : la mort d’une enfant, quinze jours après sa naissance. Tout comme il n’existe pas de terme pour définir un parent qui a perdu son enfant, il n’y a pas de manuel pour survivre à cette épreuve, à la fois déchirante et taboue socialement. Pourtant, la narratrice met tout en place pour s’en sortir et « réussir son deuil à défaut d’avoir réussi son enfant ». Avec cet hommage singulier, Doan Bui raconte l’amour maternel inaliénable et la sidération, nous émeut aux larmes et parvient même à nous faire rire en usant d’un comique de situation aussi salutaire qu’inattendu.

Jérôme Ferrari a réussi l’exploit d’écrire un bref roman riche de mille sujets, un roman à la fois grave et léger, aux sublimes envolées lyriques côtoyant des insultes pures et dures. Faisant un véritable procès au tourisme de masse, à la mondialisation et à la colonisation, il jongle entre les époques, entre la Création et ce que l’on a créé. Avec beaucoup de finesse, il dépeint ses personnages dans toute leur profondeur, dans toute leur humanité, c’est à dire parfois touchants, parfois beaux, souvent médiocres. Un roman de vies, dont les destins se mêlent ou se parasitent, qui ne manquera pas de vous marquer, et vous fera rire de toutes les couleurs. Un régal !

Un roman qui donne le sourire ! Été 1986, on y suit James et Tully, deux jeunes garçons de la classe ouvrière écossaise qui, accompagnés par toute une joyeuse bande d’amis, décident de fêter la fin du lycée en se rendant à Manchester pour participer à un mythique festival de punk rock. Cet événement, ils le vivront comme l’apogée de leur vie, à fond, sans limite. Très conscients que cette fin est également le début de leur vie d’adulte, c’est aussi pour nos deux amis l’occasion de prêter le serment que ces passions si vives qui les animent, le cinéma, la musique, mais aussi la provoc, l’humour et la révolte, survivent à ce brusque changement. 30 ans plus tard, Tully annonce une nouvelle à James, une nouvelle qui va tout chambouler… Un roman tendre et joyeux, une ode à l’amitié et au feu qui nous anime. Superbe.

Un thriller impitoyable et terriblement addictif avec pour toile de fond les loups, la montagne et les forêts allemandes. Jakobsleiter, hameau totalement replié sur lui-même qui accueille une communauté d’anabaptistes vivants avec une méfiance absolue envers la modernité, va être le théâtre de disparitions inquiétantes. L’odeur âcre de la mort s’installe dans toute la contrée et le trouble plane alors sur ses personnages énigmatiques. Complexe et jamais manichéen, ce roman noir choral ne laisse aucun répit, impossible à lâcher !